Am Fred B.

Vivre sans témoin

Autrement

10,00
Conseillé par
30 mai 2019

Eloge de la nuit

C'est un livre de philosophe et d'écrivain, qui creuse son sillon avec acuité et sensibilité, en compagnie de réalisateurs, de philosophes, de poètes : Fellini, Supervielle, Platon, Jean Eustache, Descartes, Rousseau, Fitzgerald...

De l'antiquité romaine à Las Vegas, d'une boite de nuit berlinoise à l'infini de la nuit étoilée, de l'obsession de la transparence à la fascination pour le clair-obscur, ce livre fait l'éloge de "l'indistinction nocturne", et nous rappelle que, même en plein jour, "l'homme est un être capable d'éclipses".

Le conseil de Frédéric

Conseillé par
21 mai 2019

Une langue maitrisée, libre et inventive

Rares sont les écrivains dont la voix est reconnaissable dès les premières lignes ; Antonio Lobo Antunes est de ceux-là. Une voix qui parle vraiment, souple et ondoyante, avec son souffle propre : rythme ample, qui s’emballe lorsque l’urgence est là, ou se permet des pauses - jamais très longues puisque l’auteur a banni le point.

Ce fleuve emporte dans sa course quelques pierres : un Portugais hanté par ses années de guerre coloniale en Angola, son fils adoptif ramené d’Afrique, sa femme, sa fille et sa belle-fille. Tous en route pour la « tue-cochon », dans un village reculé. Nous entendrons leurs voix, que l’auteur a mêlées en un somptueux tissage, précis et subtil comme une marquèterie, une mécanique de précision. Souvent les voix et les époques se succèdent dans la même phrase, et pourtant le lecteur ne se perd pas, guidé par les leitmotive, les scènes obsessionnelles, les bouffées d’images puissantes qui surgissent à tout moment. Car à la violence de la guerre répond l’abattage du cochon, rituel dans la famille. Le réel trivial de ces vies modestes est sans cesse troué par les scènes du passé qui s’insinuent, par l’ailleurs, par les petites phrases ressassées parce qu’elles ont marqué l’esprit. C’est hier, c’est maintenant, le temps fait des boucles ; rien ni personne n’est jamais là où il faudrait, quand il faudrait - et en ce sens c’est aussi un roman plein d’humour et d’absurde.

De même que l’épopée angolaise ne fut qu’une boucherie grotesque, comme l’auteur l’a vu de ses propres yeux et souvent raconté - de même ce fleuve puissant nous emmène vers un sacrifice tragique. Et la langue maitrisée, libre et inventive d’Antonio Lobo Antunes (et de son traducteur) nous accompagnera longtemps après les derniers mots du livre.

Coup de cœur de Frédéric

Poèmes choisis, 1965-2010

J'ai Lu

8,00
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13 avril 2019

Certains jours la rivière est incompréhensible

Jim Harrison nous est surtout connu comme romancier, mais il n'a cessé d'écrire et de publier des poèmes. Ce recueil est un choix judicieux de poèmes publiés entre 1965 et 2010, un bel aperçu de sa voix inimitable, pleine d'autodérision et de gravité. Jim Harrison se coule dans des formes variées, comme une rivière suit son cours : haïkus (à la sauce Harrison!), suites de notations au fil de l'eau, poèmes en prose, portraits, souvenirs, dialogues ... Poésie zen, parce qu'il pratique cet art à sa manière depuis longtemps, non comme une religion mais comme une certaine façon de regarder le monde : "Cela me semblait pour moi la meilleure manière d'aller au cœur des choses". Les lynx, les corneilles, les cougars et les rivières lui sont à la fois très familiers et toujours autres. "Nous sommes ici pour être curieux et non consolés", dit-il dans le long et merveilleux poème "La fenêtre d'or".
Curiosité, avidité de voir, de toucher, de saisir et de goûter ce monde :
"Je crois à d'abrupts à-pics, à l'orage sur le lac
en 1949, aux vents glacés, aux piscines vides,
au sentier invisible menant à la rivière, à l'ail frais,
aux pneus usés, aux bars, aux saloons, aux tavernes,
aux litrons de vin rouge, aux fermes abandonnées ...
aux filles qui n'ont pas viré complètement barjot ..."

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12 avril 2019

Soyons irréalistes et déraisonnables, demandons l'impossible !

En 10 chapitres très documentés et pleins d'humour, R. Bregman montre combien de belles utopies (la fin de la pauvreté, le travail choisi, l'ouverture des frontières ...) sont vraiment envisageables pour demain. Elles ont d'ailleurs fait l'objet d'expérimentations que retrace minutieusement Bregman.
Après tout, l'émancipation des esclaves et le vote des femmes n'étaient-ils pas aussi des utopies?
Coup de cœur de Frédéric

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12 avril 2019

Entre La Fontaine et la planète des singes

Magie de la SF! Imaginons une terre future, où l'homme a laissé place aux chiens. Ceux-ci ont leurs légendes, des récits qu'ils se transmettent, où l'Homme est plutôt menaçant. Qu'importe, puisque les chiens sont des doux et sensibles, d'une grande hauteur morale. De quoi nous faire réfléchir sur nous-mêmes, pauvres bipèdes...
Bien sûr, depuis La Fontaine (et ses inspirateurs de l'Antiquité), parler des animaux, c'est parler des hommes. Simak nous tend un miroir et nous amène, avec beaucoup de douceur et de patience, à nous hisser moralement à la hauteur de ces chiens ... humanistes. L'Homme a disparu, seules d'étranges paraboles rappellent son souvenir, mais est-ce si grave au fond?
Coup de cœur de Frédéric