Sollicciano, roman

Ingrid Thobois

Zulma

  • 17 avril 2012

    Norma-Jean, quinquagénaire, se rend chaque Jeudi à la prison de Sollicciano en Toscane. Elle rend visite à son ancien élève Marco. Cette femme reste un mystère pour son entourage. Cette femme a fui son refuge confortable à Paris pour un modeste appartement près de Florence.


    Ce roman renferme de multiples récits croisés, quelques bribes de vies décousues. Le personnage de Norma-Jean est fascinant. Elle est professeur de philosophie à Paris et épouse de Jean, son psychanalyste. L'auteure offre un portrait cinématographique à la Hitchcock, avec une ampleur psychologique angoissante.

    La progression dramatique est constante, Ingrid Thobois emprunte la voix de chacun de ses personnages, tour à tour. Elle délivre les secrets pas à pas de ce triangle amoureux.C'est un très bon roman sur l'enfermenent, celui de derrière les barreaux mais également l'enfermement en soi.L'intrigue oscille entre passé et présent et donne plus d'intensité encore à ce drame psychologique.

    « Je partageais avec Norma-Jean un immense besoin d’autonomie et de solitude, aussi avions nous choisi un appartement où deux couples auraient presque pu vivre sans se croiser.
    Au bord du sommeil ma respiration était forte, celle de Norma-Jean irrégulière ; il me fallait changer vingt fois de position tandis que son cuir chevelu la démangeait ; je rejetais la couette – j’avais chaud -, et elle la ramenait – elle avait froid. Épuisés, nous finissions par allumer nos lampes de chevet. Assis contre la tête du lit, pantins bordés, les mains de part et d’autre des sarcophages formés par nos jambes, nous évitions de nous regarder. Les paupières gonflées, nous fixions sur le mur d’en face la sérigraphie de Marilyn par Andy Warhol, cherchant la clef de notre repos dans cette figure bleue, son teint et sa chevelure de noyée.
    Nous avions beau nous respecter, nous aimer peut-être – si seulement les années n’écornaient pas ce mot – nous nous encombrions. A vingt ans, nous nous serions séparés pour cette unique raison. A près de cinquante ans, nous avions trouvé la solution : investir dans la literie en quantité et qualité. Nous installâmes des lits un peu partout dans l’appartement, qui nous garantissaient de pouvoir nous endormir seuls, et surtout de nous réveiller seuls – le poids du monde se rappelle si vite à nous le matin ».

    J'ai bien aimé l'ellipse autour de ce mystérieux secret même si parfois je me suis perdue au fil des pages dans les flashbacks.